Livres – Notre sélection de mai 2022

Découvrez nos conseils de lecture !

Chaque mois, les professeurs de français d'Atelier24 sélectionnent quelques livres qu'ils ont particulièrement aimés. Il peut s'agir de nouveautés, de livres parus ces dernières années, ou bien de classiques que nous avons lus ou relus. En ce mois de mai, nous avons choisi trois bandes dessinées consacrées à l'œuvre ou la vie de trois grands écrivains.

Marcel Proust et sa gouvernante

Couverture de l'album Céleste

Céleste 

Chloé Cruchaudet (2022)

Pour entrer dans l'intimité de Marcel Proust, Chloé Cruchaudet nous propose de suivre sa gouvernante, Céleste Albaret. Celle-ci resta aux côtés de l'écrivain jusqu'à la mort de ce dernier en 1922. Aux antipodes de toute mondanéité, la jeune femme débarque de sa Lozère natale à Paris en 1913. Sa spontanéité, sa fraîcheur séduisent Proust qui l'embauche.

Dans ce magnifique album en deux tomes, Chloé Cruchaudet met en scène et en images leur relation. Une planche présente ainsi Proust écrivant dans son lit À la recherche du temps perdu. Dans ce passage, il vante les qualités des Demoiselles du téléphone. Tout autour de lui, en ombre chinoise, la silhouette de Céleste est reprise plusieurs fois traitant différents appels téléphoniques de Proust. On l'imagine prenant avec ses interlocuteurs une voix et une intonation copiées sur celles de son employeur.

Au contact de Proust, Céleste se cultive, s'imprègne de son monde, mais les rôles restent bien établis : maître et domestique. Et cette relation n'est pas exempte de cruauté, de tyrannie et d'asservissement. Chacun reste à sa place.

Chloé Cruchaudet livre une œuvre hautement documentée (Céleste Albaret a accordé de nombreuses interviews) et reconstruit avec brio l'univers de Proust. Elle émaille aussi son récit de scènes oniriques qui permettent au lecteur d'accéder d'une autre façon aux sentiments et aux sensations des personnages. Pour tous ceux que l'œuvre de Proust effraie ou intimide, voici un excellent moyen d'approcher l'écrivain !


Éditions du Soleil. Collection Noctambule. Premier tome : 116 pages – Le format bande dessinée facilite la compréhension. Début de niveau B1. 

« On ne voit bien qu'avec le cœur. »

La couverture de la BD Le Petit Prince

Le Petit Prince  

Joann Sfar (2008)

Voici un défi de taille auquel Joann Sfar a répondu avec talent : adapter en bande dessinée l'œuvre mythique d'Antoine de Saint-Exupéry ! Un défi d'autant plus important que Saint-Exupéry avait lui-même illustré son récit de quelques aquarelles, passées depuis à la postérité.

L'un des apports de la bande dessinée est de nous montrer le narrateur et de mettre en images sa rencontre avec le Petit Prince. Les traits que le dessinateur donne à ce dernier illustrent d'ailleurs merveilleusement la réussite de cet album : être fidèle à l'original et être totalement original. Ce petit garçon qui vient réveiller l'aviateur perdu dans le désert est bien le Petit Prince tel que nous le connaissons, mais il est aussi un personnage résolument issu de l'imagination de Joann Sfar.

Tourner les pages de l'album est un régal pour tous ceux qui ont déjà lu le conte de Saint-Exupéry mais aussi pour ceux qui ne le connaissent pas. La magie de l'histoire reste intact.

« Le Petit Prince n'est pas un livre pour enfants, mais un livre sur l'enfance, sur la gravité propre à l'enfance. Je voulais me confronter à celle-ci, la faire ressentir sans tricher sur les émotions » confiait l'auteur au magazine Télérama à la sortie de l'album.


Gallimard. 112 pages – Le format bande dessinée facilite la compréhension. Début de niveau B1. 

« Aujourd'hui, maman est morte. »

La couverture de la BD L'Étranger

L'Étranger 

Jacques Ferrandez (2013)

Voici un autre monument de la littérature auquel la bande dessinée a apporté une seconde jeunesse ! Et c'est à Jacques Ferrandez, un grand spécialiste de l'Algérie, que l'on doit cette superbe adaptation. Il est notamment l'auteur de Carnets d'Orient, une série d'albums consacrée à l'histoire de la présence française en Algérie. Sa relecture du chef d'œuvre d'Albert Camus se nourrit visuellement de cette connaissance pointue de la région. Les détails des planches, leur luminosité donnent au récit purement factuel de Camus une force visuelle nouvelle.

De la mort de sa mère qui ouvre le livre, à son crime, puis son procès, Meursault, le héros indifférent à sa propre vie, trouve ici un visage, un corps. Cette réalité le sort de toute abstraction. À son absence d'engagement telle que décrite par Camus s'oppose grâce au dessin sa présence physique.

Ferrandez a choisi d'être le plus fidèle possible au roman de Camus. La plupart du texte (notamment le procès) est transcrite sous forme de dialogues, donnant une dynamique nouvelle, un éclairage nouveau à l'action. L'image fait aussi ressortir une sensualité présente dans le livre, mais masquée ou absorbée par la neutralité troublante de Meursault. Une belle façon d'entrer dans l'œuvre de Camus !


Gallimard. 136 pages – Le format bande dessinée facilite la compréhension. Niveau B1/B2. 

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